L'hypertension oculaire

Qu’est ce que c’est ?

La tension de l’oeil (ou tension intra-oculaire) habituelle chez l'adulte est comprise entre 10 et 21 mmHg (moyenne de 16). Elle est mesurée à l'aide d’un tonomètre à jet d'air ou d’un tonomètre de Goldmann (référence).

Définir la tension normale chez une personne donnée nécessite de connaître la rigidité de la cornée qui dépend essentiellement de son épaisseur. En effet, la mesure ne se fait pas directement dans l'humeur aqueuse mais à travers la cornée. Aussi, cette dernière (l’épaisseur de la cornée) influence la mesure.

Les personnes ayant une cornée épaisse ont une pression oculaire mesurée plus élevée que celle existant réellement dans l’œil. Par ailleurs, la pression oculaire augmente naturellement avec l'âge.

Autrement dit, la mesure de la pression oculaire n'est qu'un paramètre qui demande à être interprété en fonction de l'épaisseur cornéenne et de l'âge de la personne. Ce chiffre donné isolément ne permet donc pas d'affirmer qu'une personne est porteuse d'une maladie glaucomateuse ni qu'elle en est indemne.

Le glaucome

Le Glaucome est une maladie du nerf optique, liée à l’hypertension oculaire. Sous l’effet d’une tension trop élevée dans l’œil, le nerf optique se détruit progressivement. La conséquence de cette destruction est la réduction irréversible du champ visuel. C’est une maladie grave lorsqu’elle est évoluée car le nerf optique ne peut pas se régénérer. Elle est asymptomatique, il est donc essentiel de pouvoir la dépister à temps par des contrôles réguliers. Le dépistage précoce permet d’instaurer un traitement efficace stoppant ou ralentissant fortement l’évolution.

Il ne faut pas toujours se fier au seul chiffre de la tension oculaire pour conclure à la présence d’un glaucome. Ainsi, un glaucome peut apparaître malgré une tension normale. Et inversement un chiffre élevé ne signifie pas obligatoirement qu’il s’agit d’un glaucome.

On parle alors d’hypertonie oculaire, c'est-à-dire une tension oculaire élevée, sans aucun signe de glaucome. Dans ce cas on vous proposera, ou pas, un traitement en fonction des données vous

Qui est atteint ?

La fréquence de la maladie est élevée, surtout à partir de la quarantaine. Elle concernerait 10% de la population après 70 ans. On estime qu’il y a au moins 1 millions de cas en France. C’est la première cause de cécité totale dans les pays développés.

Glaucome à angle ouvert ou à angle fermé ?

Glaucome à angle ouvert ou à angle fermé ?

Qu’est ce que l’angle ?

L’angle irido cornéen est une structure de l’œil où se trouve le trabéculum. Ce dernier sert de filtre d’évacuation de l’humeur aqueuse (liquide qui circule dans l’œil). Si le trabéculum fonctionne mal ou qu’il est inaccessible, l’humeur aqueuse ne s’évacue plus de l’œil et la pression monte.

(photos OCT segment ant angle ouvert et fermé)

Glaucome à angle ouvert

C’est la forme la plus fréquente, l’angle irido-cornéen est ouvert, le trabeculum est accessible mais inefficace, ainsi

L’humeur aqueuse continue à être produite normalement mais s’évacue plus difficilement, la tension dans l’œil augmente donc.

Glaucome à angle fermé et glaucome aigu

L’accès au trabéculum est rendu difficile par un angle irido-cornéen qui est fermé. L’humeur aqueuse ne peut plus du tout s’évacuer alors qu’elle continue à être produite. Cette forme à la particularité de pouvoir survenir brusquement (c’est le glaucome aigu).

Le glaucome aigu se manifeste par une douleur très importante de l’œil associée à une baisse brutale de la vision, c’est une urgence ophtalmologique.

Lorsque l’angle est fermé, le but initial du traitement sera de faciliter l’ouverture de l’angle (par un traitement LASER (iridotomie) ou parfois par une chirurgie de la cataracte)

Autres formes

Glaucome du myope

Il s’agit le plus souvent d’un glaucome à angle ouvert, les forts myopes ont plus de risque de développer un glaucome.

Glaucome à pression normale

Parfois, un glaucome peut se déclarer alors même qu’il n’y a pas d’hypertension oculaire. Ces formes sont influencées aussi par des désordres vasculaires.

Glaucome congénital

Certains nouveau-nés peuvent présenter un glaucome dès la naissance. Il s’agit d’une pathologie rare, liée le plus souvent à une malformation de l’angle irido-cornéen. Le traitement est chirurgical d’emblée.

Glaucome après uvéite, traumatisme

L’inflammation intra-oculaire prolongée (uvéite) peut endommager le trabéculum et le rendre inefficace, de même, un traumatisme peut altérer le bon fonctionnement du trabéculum. (=glaucome secondaire)

Glaucome pigmentaire, exfoliatif

Ce sont des formes de glaucome qui sont liées à un état préalable du sujet : Le syndrome de dispersion pigmentaire est caractérisé par la présence de pigments qui sont libérées dans la chambre antérieure de l’œil et qui peuvent venir obturer le trabéculum le rendant inefficace. La pseudo exfoliation capsulaire est caractérisée par la prolifération d’un matériel sur le cristallin et sur l’iris. Là aussi, s’y associe une modification du fonctionnement du trabéculum le rendant moins efficace.

Comment dépister, évaluer et suivre ?

Photographies du fond d’œil

Une photographie du fond de l’œil et en particulier du nerf optique, permet de l’analyser et  de suivre dans le temps.

Champ visuel

C’est un examen de référence pour vérifier si le nerf optique fonctionne bien. Il s’agit là de mesurer pour chaque point de l’espace, quelle sera la plus faible lumière que vous pouvez voir. Une anomalie du champ visuel évoque souvent un début de glaucome.

Si le diagnostic de glaucome est posé, la répétition des champs visuels permet de suivre l’évolution de la maladie.

OCT

C’est aussi un examen de référence, il permet de vérifier l’état du nerf optique et de ses fibres visuelles qui le constituent. Une diminution de l’épaisseur de ces fibres d’un œil par rapport à l’autre ou par rapport à la population normale du même âge, évoque un début de glaucome.

UBM

Cet un mode particulier d’échographie qui permet d’analyser l’état de l’angle irido-cornéen (ouvert ou fermé) dans les cas difficiles.

Comment traiter ?

Quel est le but du traitement ?

L’objectif principal du traitement est de faire baisser la tension oculaire. Ou, du moins, d’obtenir une tension « cible ». Cette tension « cible » est considérée comme la tension en dessous de laquelle le risque de progression du glaucome est faible.

Dans les glaucomes à angle fermé il faudra en plus s’attacher à ouvrir cet angle (par une iridotomie laser ou par une chirugie du cristallin)

Il n’y a pas de régime particulier qui permette de diminuer la tension oculaire. Cependant, il est souhaitable de pratiquer une activité physique adaptée à votre âge, ne serait-ce que pour réguler la tension artérielle qui peut avoir un impact sur l’évolution du glaucome. De la même façon, la consommation de tabac est péjorative pour l’oxygénation des tissus (y compris du nerf optique)

Traitement par collyre(s)

C’est le traitement de première intention d’une hypertension oculaire à risque de glaucome ou d’un glaucome déclaré. Il existe plusieurs molécules disponibles. Le plus souvent, le traitement est débuté par une seule molécule. Par la suite, en fonction de la tolérance et de l’efficacité, on peut y associer une deuxième ou une troisième molécule.

Les différents collyres

Il y a 2 façons d’obtenir une baisse de la tension par collyres :

Soit en diminuant la production d’humeur aqueuse :

  • béta-bloquants
  • inhibiteur de l’anhydrase carbonique
  • anticholinergiques
  • alpha-2-adrénergiques myotiques

Soit en accélérant l’évacuation de l’humeur aqueuse : prostaglandines

C’est cette dernière classe thérapeutique qui est utilisée en première intention.

Tolérance et effets secondaires

Il est habituel, lors de l’initiation d’un traitement, de ressentir une irritation modérée pouvant durer 1 semaine à 10 jours.

Parfois il existe une vraie intolérance locale (rougeur excessive, eczéma des paupières, sensation majeure de sécheresse oculaire) dans ce cas vous devez en reparler à votre ophtalmologiste. Soit nous ajoutons un collyre lubrifiant qui permet d’atténuer les symptômes, soit nous changeons de traitement.

Certains traitement peuvent avoir des effets secondaires généraux : essoufflement excessif, fatigue, sécheresse de la bouche ou du nez… ces effets peuvent être limités en comprimant le coin interne de l’œil du côté du nez au moment de l’instillation (ceci permet de limiter le passage du collyre dans la circulation sanguine ou vers l’intérieur du nez)

Traitement LASER

Iridotomie au LASER YAG

Chez les patients ayant un angle étroit, qu’il y ait ou non une hypertension oculaire ou un glaucome, bien souvent, nous proposons la réalisation d’une iridotomie. Il s’agit de faire un petit trou au travers de l’iris pour faciliter la circulation de l’humeur aqueuse et l’ouverture de l’angle.

(lien mon rdv laser)

Trabéculoplastie sélective

Si le traitement par collyre est inefficace ou insuffisant ou mal toléré, en fonction des cas, nous pouvons proposer la réalisation d’une trabéculoplastie sélective. Il s’agit là de réaliser des impacts LASER sur le trabeculum (filtre d’évacuation) afin d’améliorer son fonctionnement et d’abaisser la tension.

Traitement par Ultra-Sons

Dans certains cas, si le glaucome est mal contrôlé (à cause d’une tension trop élevée) il est possible de réaliser un traitement par Ultra-Sons sur les corps ciliaires (lieu de production de l’humeur aqueuse), ce qui permet de réduire cette production et donc d’abaisser la tension.

Traitement chirurgical

Lorsque la tension n’est pas suffisamment basse malgré les techniques précédemment citées, ou lorsque le glaucome est très agressif ou à risque de l’être, nous proposons un traitement chirurgical. Là encore il s’agit d’abaisser la tension oculaire et aussi d’éviter les pics tensionnels observés au cours de la journée.

Le traitement chirurgical peut être réalisé en ambulatoire. Si vous venez de loin, une hospitalisation, la nuit qui suit l’intervention, peut être proposée.

Dans tous les cas, un contrôle le lendemain de l’opération puis 1 semaine après devront être pratiqués. Nous avons l’habitude de dire que le suivi postopératoire est quasiment aussi important que l’intervention elle-même. Il s’agit de vérifier la bonne cicatrisation et d’ajuster éventuellement les traitements. Il faut être prêt à des consultations supplémentaires de suivi.

L’intervention elle-même est réalisée sous anesthésie locorégionale, rarement sous anesthésie générale. Elle dure environ 30 minutes sous microscope. Des fils résorbables sont posés et peuvent occasionner une gêne dans semaines qui suivent (comme des grains de sables dans l’œil). Un traitement par collyre vous sera bien sûr proposé. Une baisse temporaire de la vision est habituelle au décours de l’opération.

 

Trabéculectomie

C’est la technique historique, qui consiste en la réalisation d’une petite trappe qui va se comporter comme une soupape de décompression pour l’œil. Elle permet l’évacuation de l’humeur aqueuse sous la conjonctive au travers d’une petite bulle qui se forme en haut de l’œil , sous la paupière.

Sclérectomie non perforante

Cette technique plus récente, accessible uniquement aux angles ouverts, consiste en la réalisation d’une trappe qui n’emporte pas toute l’épaisseur de la paroi de l’œil. Une partie du trabeculum reste en place et est amincie. L’avantage est la survenue moins fréquente de complication.

 

Réinterventions = réfection de bulle ou needling

Dans certains cas, au décours d’une première intervention, la filtration n’est suffisante. Dans ce cas il convient de réaliser un geste chirurgical complémentaire permettant d’améliorer le drainage et d’abaisser davantage la tension.

MIGS

Ces techniques récentes, on comme point commun, l’utilisation d’un dispositif de drainage (sorte d’implant tunnel) qui permet l’évacuation de l’humeur aqueuse. Nous proposons dès à présent certains d’entre eux qui ont obtenu une prise en charge par l’assurance maladie. De façon générale, ces techniques sont encore en cours d’évaluation.

Chirurgie du cristallin : cataracte

Dans les cas d’hypertension oculaire à angle fermé ou de glaucome à angle fermé, une iridotomie LASER est souvent proposée. Parfois elle n’est pas suffisante. Dans ces cas là, nous proposons une chirurgie du cristallin qui permet d’élargir l’angle irido-cornéen et d’abaisser significativement la tension oculaire.

Chirurgie combinée cataracte et glaucome

Glaucome et cataracte sont 2 pathologies dont la fréquence augmente avec l’âge. Il est donc habituel qu’un sujet glaucomateux développe une cataracte. Le glaucome (opéré ou non) ne contre indique pas la chirurgie de la cataracte. De la même façon, un œil déjà opéré de la cataracte peut être par la suite opéré de glaucome.

Dans certains cas, si les 2 affections co-existent, il peut être intéressant de réaliser une chirurgie combinée : cataracte et glaucome. Il faudra, dans ce cas, garder en tête que la récupération visuelle, habituellement rapide après une chirurgie de cataracte classique, peut être, dans ce cas un peu plus lente.

Questions fréquentes

Quelle est la différence entre l’hypertension oculaire et le glaucome ?

Il y a souvent une confusion entre ces 2 termes. Le glaucome est, le plus souvent, la conséquence d’une hypertension oculaire prolongée, autrement dit, l’hypertension oculaire est un facteur de risque de glaucome. Si vous avez trop de tension dans l’œil vous n’avez pas nécessairement un glaucome mais vous avez plus de risque d’en avoir, d’où une surveillance accrue et parfois la proposition d’un traitement préventif.

Le glaucome est-il héréditaire ?

Il y a effectivement une part héréditaire non négligeable dans la survenue du glaucome.

Certains gènes sont connus et associés à la survenue d’un glaucome : MYOC et OPT.

Le glaucome est-il irréversible ?

Le nerf optique est considéré comme une expansion du tissu cérébral, il permet de transmettre les informations visuelles. Toute atteinte du nerf optique est irréversible car ce tissu ne se régénère pas. D’où l’importance d’un dépistage précoce.

Les collyres génériques ?

Ils ont, a priori, la même efficacité que le médicament dit « princeps ». Parfois, on constate une différence dans la tolérance du traitement qui peut être différente avec les collyres génériques. Si vous constatez une différence notable n’hésitez pas à en parler à votre ophtalmologiste.

Collyres  anti-glaucomateux et lentilles ?

Si vous êtes traité par un ou des collyres pour abaisser la tension oculaire, il est habituel d’éviter une instillation au moment où vous portez des lentilles souples. Il faudra alors instiller les gouttes avant la pose ou après la dépose des lentilles. De plus il faudra, en accord avec votre ophtalmologiste, privilégier des collyres sans conservateur.

En cas de port de lentilles rigides ces contraintes ne s’appliquent pas.

Après une chirurgie de glaucome, la filtration efficace est marquée par la présence d’une bulle sur le haut de l’œil. Cette bulle peut, d’une part, gêner les mouvements de la lentille et, d’autre part, la bulle peut être abimée par le bord de la lentille. Il faudra dans tous les cas discuter avec votre ophtalmologiste de cet aspect des choses.

Glaucome et chirurgie réfractive ?

Toute chirurgie réfractive à comme conséquence de diminuer l’épaisseur cornéenne. Cette diminution d’épaisseur entraine une perturbation dans la mesure de la tension oculaire (risque de sous évaluation). Ainsi le suivi d’une hypertension oculaire ou d’un glaucome est rendu plus difficile.